“En Argentine, si tu n’as pas de diplôme mais de l’expérience ou une super motivation, on te laisse faire tes preuves” Laetitia Sarafian, restauratrice à Mar del Plata

Tout quitter, partir à l’autre bout du monde, y rencontrer l’amour et ouvrir un restaurant en bord de mer, vous en rêvez ? Lætitia l’a fait ! Après plusieurs années passées dans le ecommerce à Paris, elle n’a pas hésité à tout lâcher pour s’installer en Argentine, où elle avait déjà passé quelques temps lors d’un tour du monde, et se mettre à sa passion, la cuisine. Avec un restaurant à puertas cerradas et des cours de cuisine qu’elle donne avec son fiancé argentin Lucas, aux habitants de Mar del Plata. Vous pouvez aussi retrouver ses recettes sur son blog Cuisine Mon Amour.

lucasylaety

Qui es-tu ? Quel est ton parcours ?

Laëtitia Sarafian, je suis Française, j’ai 36 ans. J’ai étudié les langues étrangères (LEA Anglais-Italien) à la Sorbonne puis j’ai fait une École de commerce à Marseille. J’ai travaillé dans le marketing en occupant toujours des postes avec une dimension internationale puis j’ai été associée d’une marque de beauté et j’ai créé un site de e-commerce dans le même domaine. Aujourd’hui j’ai tout changé !

Aujourd’hui j’ai tout changé !

Qu’est ce qui t’a amené en Argentine ? A Mar del Plata ?

Mon fiancé argentin ! Mais je connaissais déjà l’Argentine et je m’y sentais bien, il y a beaucoup de similarités avec le Sud de l’Europe. J’avais envie de quitter Paris.

Que fais-tu en Argentine ? Que proposez-vous à vos clients ?

Mon départ pour l’Argentine a été l’opportunité de faire ce que je souhaitais faire profondément : Cuisiner et partager mes petits plats ! Je tiens un blog de cuisine bilingue Cuisinemonamour.com et je donne des cours de cuisine dans des écoles de Gastronomie et à des particuliers. J’écris aussi des recettes et des anecdotes de voyage dans des magazines et blogs locaux. Enfin, j’ai un restaurant à puertas cerradas Chez Lucas y Laety que je dirige avec mon fiancé Argentin.

Pourquoi la cuisine ? Comment est née l’idée ?

Je suis française et j’ai vécu à Versailles, à Marseille puis à Paris pendant 35 ans. Je viens d’une famille arméno-sicilienne et la cuisine a toujours été au cœur de nos préoccupations. J’ai été entourée toute ma vie par d’excellentes cuisinières. Avec mes amis, j’ai toujours été la cuisinière du groupe, j’ai toujours aimé recevoir, inviter, cuisiner et manger bien sur ! J’ai fait un Tour du monde et j’ai découvert encore plus de saveurs et j’en ai profité pour prendre des cours de cuisine dans de nombreux pays.

L’idée et l’envie je les ai toujours eu mais je ne savais pas comment me lancer. En étant en Argentine, je me suis rendue compte que j’avais une vraie valeur ajoutée. Les Argentins mangent très simplement cependant il y a un vrai désir de la part de certains de découvrir de nouvelles saveurs… C’est pourquoi en donnant des cours de cuisine des 4 coins du monde et en proposant un menu différent chaque semaine dans notre restaurant, je réponds à ce besoin.

Les Argentins mangent très simplement cependant il y a un vrai désir de la part de certains de découvrir de nouvelles saveurs

Quel est la philosophie de votre restaurant ?

C’est un restaurant à puertas cerradas (qui signifie recevoir les gens chez soi, de façon intime et leur proposer une nourriture faite maison). Nous ouvrons seulement certains jours par semaine et c’est sur réservation. Notre concept est de servir un menu assez réduit mais qui change chaque semaine. Nous proposons une nourriture originale, internationale et tout est fait maison. Nous recevons chacun de nos clients comme s’ils étaient nos amis et notre souhait est qu’ils se sentent comme chez eux.

Comment vous faites-vous connaitre ?

Facebook, Tripadvisor, Cookapp (une application locale pour aller diner dans la maison d’un Chef) et le plus efficace reste le bouche à oreille.

Entreprendre en Argentine, c’est plus facile qu’en France ?

En très très peu de temps, nous avons pu ouvrir notre restaurant. J’ai obtenu mon visa de travail très rapidement et au-delà du temps, j’ai été traitée de façon incroyable, avec beaucoup de respect et de convivialité.

Comment te sens-tu depuis que tu as quitté la France ?

Je me sens bien ici mais ces derniers jours sont plutôt difficiles vu la terrible actualité en France. Je suis contente de vivre ici, j’avais un vrai besoin de quitter Paris et je recherchais une vie plus tranquille. J’étais Co-gérante d’une société et je ne voyais pas assez le jour à mon goût.

Mais je me sens très Française, mes proches sont loin et Paris me manque… Alors oui je suis très bien ici pour un temps ou pour toujours je ne sais pas encore mais c’est vrai que les Argentins sont très très chaleureux et au quotidien c’est ultra appréciable. De plus, ils adorent et admirent les Français et dans mon activité c’est un vrai avantage.

Je suis très bien ici pour un temps ou pour toujours je ne sais pas encore

Penses-tu que tu aurais pu créer ton restaurant à Paris ? Et que tu aurais eu l’idée, le courage de le faire ?

J’étais déjà Entrepreneur en France donc je crois que j’aurais pu le faire mais mes limites auraient été d’ordre financier. Ici avec très très peu d’investissement (notamment lié à notre concept) nous avons pu ouvrir un restaurant.

Qu’est ce qui te manque de la France ? Qu’est ce qui est mieux/moins bien en Argentine ?

La France est mon pays, ma famille et mes amis me manquent clairement ! Côté cuisine, j’ai appris à faire la baguette donc le pain ne me manque plus mais le fromage français et tous nos bons produits restent uniques… En France on a de la variété et du choix ! Il faut donc apprendre à cuisiner et à rester créatifs avec le peu de produits qu’il y a sur place. De plus, tous les équipements sont hors de prix ! Quand un équipement tombe en panne, on l’emmène à faire réparer, ça revient moins cher que de le changer. Un premier prix de bouilloire électrique coûte 80euros vs 10 voire 15 euros en France… Ici, tout est très cher et souvent de mauvaise qualité parce que les importations sont limitées voire interdites… Le nouveau Président vient tout juste d’être élu alors nous croisons les doigts pour une nouvelle politique d’importation.

Ce qui change réellement entre les 2 pays : ici il y a moins de règles ou du moins elles sont moins respectées, ce qui entraîne du pour et du contre. Voici quelques exemples concrets :

  • Contrairement à la France, si tu n’as pas de diplôme mais de l’expérience ou une super motivation, on te laisse faire tes preuves
  • Tout le monde se tutoie et les gens sont très chaleureux donc ça rend le quotidien très agréable
  • Tout est beaucoup plus lent alors si tu délivres un service plus rapidement, ça paye et surtout tu fais la différence
  • Les règles ne sont pas ou peu respectées donc niveau sécurité routière, c’est pas ça…
  • Les gens sont très informels et parfois dans le boulot c’est très compliqué, ils ont du mal à s’engager…

Ici, tout est très cher et souvent de mauvaise qualité parce que les importations sont limitées voire interdites

Comment perçois tu l’entrepreneuriat en Argentine ? Les argentins sont t-ils des entrepreneurs ?

Quand je suis allée à la Chambre de Commerce française à Buenos Aires, on m’a vivement recommandé de me mettre à mon compte si je voulais gagner un minimum d’argent parce que les salaires sont faibles. Je connais énormément d’entrepreneurs et quasiment tous les étrangers. Il y a une vraie dynamique et les démarches sont beaucoup plus simples et rapides qu’en France.

Le pays attire t-il des entrepreneurs étrangers ?

Jusque là il y avait un fort protectionnisme donc pour le moment je ne peux pas répondre. On espère que le changement de cap politique va attirer les entreprises françaises parce qu’il y a un fort potentiel pour la France qui a une image très positive ici.

Quels sont vos projets ?

Nos projets sont d’ouvrir plus de jours notre restaurant à puertas cerradas à Mar del Plata mais en conservant notre concept de fait maison et notre service amical. A terme, pourquoi pas ouvrir ce même concept ailleurs, à l’étranger ou dans d’autres villes argentines ?