“Le paiement mobile est une forme de bancarisation en Afrique. En Europe, cela reste un gadget” Sébastien Burlet, CEO de Lemon Way

"Le paiement mobile est une forme de bancarisation en Afrique. En Europe, cela reste un gadget" Sébastien Burlet, CEO de Lemon Way

Le paiement en ligne est un vaste secteur concurrentiel, avec d’un côté les banques, et de l’autre les Fintech de la jeune génération qui se sont développées comme une alternative aux acteur historiques depuis la crise financière de 2008. Deux mondes que tout oppose au delà du périmètre d’action tant au niveau de l’innovation que de la pénétration des marchés. Alors que les banques peinent à investir la nouvelle économie faite de paiement entre particuliers, de market place, de collectes et de cagnottes, ces plateformes apportent des réponses à des opérations de paiement complexe que les banques ne savent pas toujours gérer.

Fondée en 2007, Lemon Way s’impose aujourd’hui sur les services de financement participatif, cadeaux communs, billetterie, services entre particuliers, ainsi que sur le co-voiturage, la colocation, le crowdfunding et le paiement mobile dans 29 pays européens et en Afrique, notamment le Mali où la startup compte plus de 700 000 comptes clients.

Sébastien Burlet, DG Fondateur de Lemon Way nous en dit plus :

Sébastien Burlet

Comment Lemon way s’est-elle imposée sur le paiement en ligne et le paiement mobile en si peu de temps ?

Lemon Way a démarré son activité il y a 8 ans. Il y a donc une avance technologique considérable en matière de sécurité, de boarding de clients dans le digital, avec signature électronique, de processus de contrôle, et de réputation dans l’écosystème des banques.

La plateforme de paiement a d’abord été vendue auprès de banques en France et à l’international, qui voulaient lancer des « concurrents de Paypal » dans leur pays. Quand Lemon Way a obtenu son agrément ACPR Banque de France fin 2012, au même moment on assistait à l’émergence de la nouvelle économie du secteur du digital en Europe. Cette concordance historique dans le paiement, associée à une équipe de managers qui sait développer des entreprises de 1 à 300 salariés rapidement en restant agile, et une stratégie de massification, ont mené au succès que l’on connaît

Comment fonctionne Lemon Way pour un particulier ?

Les particuliers se rendent sur l’un des 300 sites partenaires de Lemon Way, par exemple un site de CrowdFunding tel que FinSquare, BulbInTown, WeSeed, Lendosphere, ou encore PretGO. Ils doivent ouvrir un compte Lemon Way en transmettant des documents justificatifs d’identité, et de domicile, ainsi que leurs coordonnées bancaires, et signer un contrat numériquement. Un peu comme une ouverture de compte sur Boursorama ou Axa Banque. Ensuite, ils peuvent bénéficier des services de paiement par carte bancaire, par chèque, par virement, permettant à Lemon Way d’exercer son « métier bancaire » au sens « paiement ». Les sites partenaires exercent l’autre partie du métier qui ne concerne pas le paiement. Par exemple le métier du scoring des entreprises et de la gestion des prêts pour les sites de CrowdFunding, ou bien la mise en relation de particuliers pour les places de marché de colocation, de covoiturage, etc.

Comment avez-vous séduit vos clients ces dernières années ? Que leur apportez-vous ?

Premièrement, nous comprenons leur métier ! C’est déjà un sacré challenge pour les banques.

Nous leur apportons une expérience dans la gestion des paiements complexes en Europe avec des monnaies et des moyens de paiements utilisés dans 29 pays Européens. De plus nous les aidons également à combattre la fraude. Nous les aidons à augmenter leur Chiffre d’Affaires avec un taux d’acceptation en France jusqu’à 15% supérieur aux systèmes de paiement par carte bancaire des autres pays, car nous travaillons via le GIE Cartes Bancaires et BNP Paribas.

Nous sécurisons l’argent que nous détenons pour le compte de tiers dans des comptes séquestre appelés Comptes de Cantonnement, et nous garantissons que cet argent ne peut pas être volé, ni même repris par un liquidateur, dans le cas d’une faillite de l’un de nos clients partenaires. Nous rassurons donc les citoyens qui payent sur les sites de la Nouvelle Économie.

Quelle est la spécificité des sites sur lesquels vous intervenez par rapport au e-commerce classique ?

La spécificité est d’abord réglementaire : il faut un agrément de la banque centrale d’un pays Européen, passeporté en France, pour pouvoir proposer des services de paiement à ces sites qui détiennent de l’argent pour le compte de tiers, avant de le redistribuer. Il y a eu des excès par le passé, des faillites, et les usagers ont payé les pots cassés. En e-Commerce « classique », une faillite ne vous prend pas votre argent, mais votre frigo n’est pas livré. Le stock appartient à une enseigne qui livre sa marchandise.

En mode « place de marché de e-Commerce », une fois le paiement effectué sur le site, la place de marché effectue les commandes auprès de X fournisseurs et prend sa marge, puis paye les fournisseurs. Si la place de marché fait faillite ou a des difficultés financières, l’argent détenu par Lemon Way pour le compte de tiers sera remboursé aux clients. Et les fournisseurs pourront être payés.

En mode « CrowdFunding », c’est également une obligation légale de travailler avec un établissement de paiement ou de monnaie électronique, pour protéger les fonds pendant les phases de collecte, et prévoir des clauses d’extinction et de continuité d’activité si la plateforme de CrowdFunding venait à disparaître. Cette responsabilité est confiée à Lemon Way.

La Nouvelle Economie du secteur du digital est souvent basée sur des sites qui mettent en relation des particuliers entre eux, organisent des services innovants moyennant une rémunération : location entre étudiants, partage de voiture, échange de services, circuits courts. Lemon Way sécurise le paiement des intermédiaires, des particuliers qui s’échangent des services, ainsi que le paiement de la place de marché. Il y a un niveau de complexité important par rapport au e-Commerce, que la plateforme Lemon Way gère au quotidien.

Lemon Way sécurise le paiement des intermédiaires, des particuliers qui s’échangent des services, ainsi que le paiement de la place de marché

Pourquoi avez-vous investi ces domaines ?

Nous sommes passionnés par l’innovation et les challenges de lancement de nouvelles marques en rupture avec les modèles classiques. On ne peut pas être mieux servi chez Lemon Way si on partage ces passions : concurrence des Taxis, des Hôtels, location de voiture électrique Tesla avec Blooweels, circuits courts permettant une alternative économique viable aux grandes surfaces, solutions d’épargne avec rémunération risquée à 12% avec le CrowdFunding prêt, etc. Nous vivons les changements dans les usages de chacun au quotidien et à 400% !

Pourquoi des opérateurs de paiement tels que vous arrivent à s’imposer sur un marché jusqu’ici dominé par les banques ?

Ce marché n’est pas dominé par les banques. Il est nouveau. Il est dominé par les Établissements de Paiement et les Établissements de Monnaie Électronique. Au début il n’intéressait même pas les banques pour plusieurs raisons : trop complexe à comprendre, peu de volumes de paiement au démarrage, et concurrence de leurs clients existants, grandes enseignes historiques. Je crois qu’ils n’y croyaient pas. La nouvelle génération a imposé ces nouveaux usages et il a fallu trouver rapidement des solutions innovantes et agréées. INNOVANT, RAPIDE : tout l’inverse de la banque traditionnelle.

Comment vous perçoivent les banques ?

Seule la banque partenaire de Lemon Way gagne. Toutes les autres perdent régulièrement des pans entiers de métier de la nouvelle économie. De plus, elles se mettent en risque de perdre des clients existants qui ont besoin de notre savoir-faire maintenant. Car lorsque on ouvre le marché à de nouveaux acteurs, on rabat les cartes. Et tout est désormais possible.

Lorsque on ouvre le marché à de nouveaux acteurs, on rabat les cartes. Et tout est désormais possible

Pourquoi ont-elles raté le coche du paiement en ligne et du paiement mobile ?

Le propre de l’industrie est d’industrialiser, pendant que les startups innovent et font des paris, pour surfer sur une vague. Si la vague est bonne, ou très bonne, comme une vague sur 100, la startup élue devient une licorne. Et le secteur bancaire sait travailler avec des futures licornes. C’est juste une histoire d’inertie et de liberté de mouvement.

Où en est-on en France sur le paiement mobile ?

Skimm n’a pas fonctionné. KWIXO, lancé par le Crédit Agricole, a échoué. Mais nous croyons dans HexaPay pour le paiement du cinéma, à Pumpkin, qui allie le paiement mobile et les réseaux sociaux, et au paiement sans contact pour les téléphones Android, sans carte bancaire. Notre vision de «la carte bancaire qui a fondu » ou « d’une carte avec une antenne » issue de notre premier brevet déposé en 2008, était donc prémonitoire.

Le secteur des fintech fait couler beaucoup d’encre. Est-ce un véritable enjeu, une tendance, un feu de paille, un marché compliqué pour se développer ?

Un véritable enjeu de société qui colle aux nouveaux usages de génération de consommateurs d’aujourd’hui.

La France peut-elle s’imposer au niveau mondial sur ce secteur ?

La finance est à Londres.

Le paiement est en France.

La France peut s’imposer sur le niveau Européen. La taille du marché est importante, et la monnaie EURO donne un avantage considérable par rapport au Royaume-Uni.

Pourquoi vous êtes-vous lancés sur l’Afrique et en particulier le Mali ?

Nous avons choisi le Mali pour le paiement mobile, car ce pays a besoin de « compte nomades » qui remplacent les banques traditionnelles. Le taux de bancarisation est faible, donc il y a très peu de concurrents par rapport à la taille du marché. Le pays est en reconstruction et a besoin de l’aide technologique de la France. Le Mali peut compter sur Lemon Way.

Qu’apportez-vous de plus ou de différent qu’Orange ?

Nous connaissons bien Orange Money en Afrique, puisque nous avions lancé la première solution de paiement mobile à Madagascar 3 mois avant Orange, avec un partenaire bancaire local.

Lemon Way en Afrique est un compte nomade pour tous : on remarque beaucoup de dépôts, plus que de transferts d’argent immédiats. Lemon Way fonctionne quel que soit l’opérateur et le type de téléphone ou d’ordinateur. Il ne faut pas absolument avoir un téléphone Orange Money pour utiliser Lemon Way. Nous déployons un système ouvert, un hub de paiement universel compatible avec tous les opérateurs. En résumé, Lemon Way ressemble plus à une banque innovante et agile, qu’à un opérateur de télécommunications innovant.

En plus du paiement mobile, nous emportons au Mali avec nous, les talents des 300 partenaires Internet de Lemon Way dans l’économie du digital : crowdfunding au Mali, collecte pour le Ramadan au Mali, collecte pour les mariages Maliens, cartes de paiement GIM, etc. De plus, la presse locale indique que nous sommes plus compétitifs.

Quelle est votre stratégie de développement sur le continent ?

En 2016, nous ouvrons 10 pays nouveaux en Afrique, principalement sur la zone UEMOA. Un réseau de partenaires a été tissé depuis 8 ans.

Le paiement mobile participe au développement du continent africain, comment le voyez-vous évoluer ces prochaines années et en quoi peut-il jouer un rôle majeur dans l’Afrique de demain ?

Le paiement mobile est une forme de bancarisation en Afrique. En Europe, cela reste un gadget.

Quels sont les projets de Lemon Way ces prochains mois ?

Nous vous réservons une surprise avec un mPOS Lemon Way !


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