Depuis quelques années, il y a une guerre qui fait rage dans les échanges avec d’un côté ceux qui se posent comme non-consommateurs et de l’autre ceux qui achètent tout le temps sans compter. Les uns ne comprenant pas les autres et s’interrogeant sur le trouble psychologique entourant ce phénomène. Alors que jusqu’à la crise de 2008, personne ne se posait la question de savoir s’il consommait beaucoup trop ou non, ces derniers temps avec la montée du chômage et du coût de la vie, beaucoup ont réfléchi à leur budget. Sans oublier les nombreux reportages, films, livres et blogs qui vantent les mérites de ceux qui sont passés de l’ultra-capitalisme à une pauvreté choisi. Comme l’Homme aime à mettre son prochain dans une case, il n’y avait qu’un pas pour séparer ceux qui ont fait ce choix d’arrêter d’acheter, suite à un burn out, un accident, une baisse des revenus, une crise existentielle, de ceux qui continuent de dépenser plus que de raison.
La bonne nouvelle, c’est que tant que chacun est heureux, il n’y a qu’à continuer. D’une part parce que consommer, cela entretient la croissance économique de notre pays, cela crée de la richesse qui pourra être redistribuée en créant des emplois (même si les actionnaires passent avant, soyons réalistes). Un pays qui ne consomme plus cesse d’innover, car à quoi bon créer de nouvelles choses si personne ne les achète ?… D’autre part, parce que se faire plaisir en s’offrant quelque chose de temps en temps fait du bien au moral. Pour autant faut-il dépenser toute sa paye, s’endetter et faire du shopping sa raison de vivre ? Accumuler les objets dont on n’a pas besoin est aussi inutile que de ne rien consommer. A force d’acheter des choses, on perd le plaisir qu’on pouvait y prendre au début, on a encore envie d’acheter ce petit truc qu’on n’a pas pris mais qui irait si bien avec notre nouveau canapé ou notre nouvelle robe… “Ces choses qui donnent envie d’autres choses”, vous vous souvenez ?
Alors il faut trouver un juste milieu et surtout être conscient de ce qu’on dit, ce qu’on pense et ce qu’on fait. Affirmer qu’on ne s’achète jamais rien, qu’on se contente de peu et militer pour la décroissance tout en disant “moi mon truc ce sont les voyages, j’en fait 4 ou 5 par an”, c’est un non-sens. Voyager, c’est consommer, du billet d’avion, à la paire de chaussures de randonnée, aux déplacements et à la nourriture sur place. C’est simplement que vous préférez consommer de façon dématérialisée à vos yeux par rapport à si vous achetiez 20 paires de chaussures chaque année. Chacun son truc et ses priorités, mais tout le monde est un consommateur. Même ceux qui ont de très faibles budgets arrivent à s’offrir un iphone…
Bizarrement, on attribue le terme de “consommateur” à celles et ceux qui achètent des objets électroniques, des vêtements, des accessoires de mode ou déco, mais rarement à ceux qui partent en voyage ou s’offrent des spectacles. Alors que dans tous les cas, chacun est bien un consommateur des choses qui l’intéressent, lui font plaisir et le rendent heureux. Ce qui est amusant c’est de voir comment s’est retournée la norme en moins de 10 ans. Alors que jusqu’en 2008, il fallait consommer pour exister et montrer qu’on avait réussir dans la vie, aujourd’hui il faut au contraire déplacer ses priorités sur la recherche de sens à son existence en nourrissant son âme. Alors forcément s’acheter des objets, c’est le mal, alors que partir à la rencontre de la dernière tribu d’Amazonie, c’est formidable. Tout en affirmant qu’avant, lorsqu’on était de méchants consommateurs de choses inutiles, on n’était pas heureux, alors qu’aujourd’hui en ne s’achetant plus rien, en vivant dans 20m², et en mangeant des pâtes tous les soirs, la vie est tellement plus belle. On a compris où était l’essentiel et la vérité suprême, que ce n’est pas l’accumulation d’objets, une grande maison et dormir dans des palaces qui fait le bonheur. Évidemment c’est vrai, mais au fond de soi, on l’a toujours su, c’est simplement que c’était la norme d’avant la crise de réussir financièrement et socialement. Alors qu’aujourd’hui c’est changer le monde avec les moyens du bord (enfin avec l’argent des investisseurs et de papa/maman) qui est devenu la norme. Vous devez vous contenter de ce que vous avez et ne pas vouloir plus pour vous-même.
Chacun est libre d’être celui qu’il a envie d’être tant que cela le rend heureux et que cela n’est pas subi. Acheter pour compenser un mal-être profond ou devenir pauvre par manque de budget, c’est triste et c’est une réalité que beaucoup occultent pour ne pas voir le vrai problème et y apporter une solution. Pour autant, personne n’a à juger l’autre sur son mode de consommation. Chacun agit en fonction de ses convictions et n’a pas à se justifier ou céder à une mode, qui sera oubliée dans 3 ans. Le tout est d’être aligné avec ses valeurs profondes et être heureux d’agir ainsi. C’est simple, il suffit de comprendre comment vous réagissez quand vous acheter un objet que vous n’aviez pas besoin : vous sentez-vous heureux ? Durablement ? Ou culpabilisez-vous ? Idem, quand vous ne pouvez pas vous offrir un restaurant avec vos amis, que ressentez-vous ? De la paix ou de l’animosité envers eux ? Ensuite une fois que vous avez compris cela, il ne vous reste plus qu’à tenter de rejoindre votre point d’équilibre qui fera que vous vous sentirez bien que vous soyez un hyper-consommateur ou un non-consommateur. Dans les deux cas, vous agissez à la fois pour le bien et le mal de notre monde, donc à vous de choisir votre camp.