“Les habitants de Qaanaaq, le village le plus au nord du monde, sont sur Facebook !” Sébastien Tixier, Photographe à la rencontre des transformations du Groenland

"Les habitants de Qaanaaq, le village le plus au nord du monde, sont sur Facebook !" Sébastien Tixier, Photographe à la rencontre des transformations du Groenland

Alors qu’aujourd’hui la photographie est  la portée de tous – surtout les selfies, mais est-ce de la photo ?…- certains ont fait le choix de s’y mettre vraiment assidument, avec passion et détermination. C’est le cas de Sébastien Tixier, photographe depuis une dizaine d’années. C’est en 2004, alors qu’il était ingénieur – il l’est toujours- qu’il achète son premier appareil photo numérique avec l’idée de “faire des photos sérieuses et pas des photos de vacances“. 2004 c’est un peu l’année qui a vu l’argentique de papa devenir vintage au profit du numérique qui offrait plus de possibilités et de facilités. En 2005, Sébastien ne pense pas encore à faire carrière dans la photo, mais se passionne de plus en plus et expose même ses photos dans des bars un an plus tard.

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Il se dit alors qu’il se passe un truc et se déclare en 2008 entant que photographe professionnel indépendant, “pour faire les choses plus sérieusement, de vrais travaux“, avec un statut d’artiste auteur. C’est alors le moment de ses projets personnels, réalisés sur son temps libre, les soirs et week-ends, tout d’abord en studios, puis en reportage à l’étranger en commençant par L’île japonaise d’Hashima et quelques années plus tard le Groenland.

L’idée avec le Groenland était de comprendre “comment vivent les gens dans ce pays à l’ère du numérique et des technologies“. Bercé dans son enfance et son adolescence par les histoires de son père sur les peuplades de contrées lointaines, Sébastien avait vraiment envie d’aller découvrir la réalité de la vie sur un territoire hostile, sans pour autant avoir un œil d’anthropologue ou de reporter. “Je voulais raconter la vie des inuits d’aujourd’hui uniquement par mes photos“. “Je parle par l’image, je ne sais pas écrire, il fallait donc accrocher l’œil des lecteurs“.

Un séjour au Groenland ne s’improvise pas : Sébastien met 6000€ de côté pour financer son voyage sur place. Pour rentrer dans le budget, il pratique le couchsurfing, l’ancêtre de AirBnb, lorsque recevoir des inconnus chez soi n’avait pas d’objectif financier, et se fait des premiers contacts par Facebook, le réseau social numéro un au Groenland. Pendant un an et demi, il se documente, apprend, découvre le pays, son histoire, ses coutumes, la vie locale et se focalise sur les changements de la société à la fin des années 2000. Il découvre alors que les inuits sont très en avance sur les nouvelles technologies, “les changements étaient encore plus marqués que je ne le pensais une fois sur place“. Les croyances occidentales sur le reste du monde ont la vie dure… “Au Groenland, il y a des HLM, des voitures, des bloggeuses mode, un Street Fashion Nuukstyle même !” Les rencontres qu’il fait sur place lui permettent de mettre en contraste les traditions des inuits et la vie moderne, l’ouverture à l’occidentalisation et l’autonomie par rapport au Danemark, l’envie des jeunes de vivre à Copenhague tout en gardant ses racines.”Facebook par exemple est massivement utilisé, les habitants de Qaanaaq, qui est l’un des villages les plus au nord du monde sont sur Facebook !“.

Des nuances que Sébastien saisit avec son appareil photo pendant plusieurs mois en immersion totale et qu’il décide de partager à son retour en exposant dans des galeries et festivals, en participant à des concours, en étant présent sur les réseaux sociaux et en faisant éditer un livre, Allanngorpoq, grâce à la participation des crowdfunders sur KissKissBankBank en décembre 2014. Il récolte en quelques jours 5200€ pour auto-éditer son livre et assurer sa promotion. Un livre qu’il a travaillé seul, de la mise en page, au graphisme, en passant par la conversion des photos au bon format papier et couleurs.

Aujourd’hui Sébastien continue de travailler sur ses projets personnels et n’envisage pas de travailler pour une agence qui le priverait de sa liberté de création. Il pense retourner d’ici deux ans au Groenland pour poursuivre ses observations des mutations de la société inuit, mais aussi effectuer un nouveau voyage à la rencontre des populations vivant dans les pays émergents, et ainsi étudier leur évolution dans la société moderne.

A découvrir sur son site : http://www.sebtix.com/fr/home

Aux premières loges, le Groenland subit les effets des changements climatiques, et assiste également depuis les dernières décennies à de profondes transformations de société. La culture inuit cohabite désormais avec une ouverture aux modes de vie et de consommation occidentaux. Les supermarchés et les téléphones portables s’invitent dans la culture inuit, et les tenues traditionnelles en peaux ne sont plus utilisées qu’au nord pour les voyages en traîneaux. Du 67° au 77° parallèle nord, depuis les villes modernes jusqu’aux nuits en tente sur la banquise à chasser le phoque, les photographies de ce livre posent un regard sur ces contrastes qui rythment le pays. Le livre est préfacé par Stéphane Victor. « Allanngorpoq » en Groenlandais peut être traduit par « se transformer »

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