“L’idée a été de doter la filière maritime Aquitaine d’un nouveau circuit d’économie circulaire sur ces peaux de poissons” Marielle Philip fondatrice de peau marine

"L’idée a été de doter la filière maritime Aquitaine d’un nouveau circuit d’économie circulaire sur ces peaux de poissons" Marielle Philip fondatrice de peau marine

La COP21 commence ce week-end et les initiatives (pas assez nombreuses) liées à l’écologie sont activement recherchées sur le territoire français pour changer la donne sur la consommation, les déchets, l’utilisation de produits chimiques, etc… Un secteur, la green economy, où il reste énormément à faire et sur lequel il faut se battre sans perdre la foi pour arriver à faire bouger les choses sur le long terme.

C’est ce qu’a fait Marielle Philip, fondatrice de Femer peau marine, une peausserie, installée en Aquitaine, qui valorise le cuir de poisson dans une logique d’économie circulaire et écoresponsable. Une initiative qui au delà de ses ambitions écologiques redonnent une nouvelle vie à la filière du poisson sur le territoire aquitain. Une solution qui pourrait s’imposer à terme face au cuir animal.

Femer, c’est aussi l’histoire de Marielle et sa maman Monique. A l’origine, Monique, alors Présidente de l’Association « Femmes de mer en partage » et de la « Fédération nationale des femmes du milieu maritime » découvre lors d’un voyage associatif et maritime dans le cadre de ses échanges européens, le concept du cuir de poisson issu de la tradition ancestrale laponne. Elle tombe amoureuse du produit et décide d’en connaître tous ses secrets. Avec l’aide de l’Axe 4 du FEP (Fonds européens pour la pêche), une cellule expérimentale a permis d’adapter ce process au territoire et aux espèces locales. Marielle se met alors au travail pour étudier l’opportunité de créer un circuit d’économie circulaire, en valorisant les peaux de poissons, destinées à être jetées, en un cuir de qualité. Toutes deux décident alors d’œuvrer pour la conception d’une nouvelle filière sur le territoire Aquitain et sur le Bassin d’Arcachon.

Marielle a remporté le prix du jury Économie sociale et solidaire organisé par BGE en novembre dernier, jury dans lequel nous étions et avons eu le coup de coeur à a foi pour le projet de Femer, mais aussi et surtout pour le peps et la passion de Marielle pour son projet.

Marielle nous en dit plus :

Marielle Philip

C’est quoi peau marine ? D’où est née l’idée et comment l’avez vous mis en place ?

La SAS peau marine exploitant la marque Femer eau marine est une peausserie spécialisée en cuir de poisson, dans une démarche éco-responsable et en économie circulaire. Le tannage est exclusivement 100% naturel et végétal à partir d’un tanin extrait d’une plante invasive notamment dans la forêt de la Dune du Pyla (Bassin d’Arcachon), le mimosa.

Nous transformons en cuir les co-produits de peaux de poissons à partir des espèces qui ont fait l’objet d’une extraction de leur peau pour leur conditionnement alimentaire. Ce savoir-faire permet à la fois de valoriser un déchet en une matière noble mais aussi de proposer de nouveaux grains et textures à des designers, créateurs et plus généralement à l’industrie qui travaille classiquement le cuir.

Lors d’un voyage dans les pays scandinaves, nous avons découvert une tradition ancestrale laponne du tannage végétal des peaux de poissons. Nous avons dès lors fait le constat que sur notre région maritime et plus généralement en France (pays avec une importante façade maritime), il n’y avait pas de débouchés de ce type sur les poissons conditionnés par les industries agro-alimentaires. La peau des poissons (co-produit) était traitée majoritairement en déchet par ces entreprises.

L’idée a donc été de doter la filière maritime Aquitaine d’un nouveau circuit d’économie circulaire sur ces peaux de poissons, créateurs d’une forte valeur ajoutée sur le produit avec un fort potentiel de développement d’emplois locaux.

L’idée a été de doter la filière maritime Aquitaine d’un nouveau circuit d’économie circulaire sur ces peaux de poissons

Qui êtes vous, quel est votre parcours qui vous a mené à cette création ?

J’ai une formation universitaire de 5 ans. Juriste de formation, titulaire d’un Master I en droit de l’environnement avec des modules d’économie de l’environnement et du développement durable, j’ai obtenu en 2011 un Master II en Gestion des territoires littoraux et des mers et de leurs activités économiques.

Qualifiée donc pour travailler au sein de structure liée à l’environnement, au littoral, au développement durable et à l’économie circulaire, mon cursus m’a permis de développer le projet Femer peau marine, directement en lien avec mes études universitaires.

Par ailleurs, j’ai effectué mon stage de fin d’études à Mayotte pour le développement des piscicultures marines et travaillé ensuite auprès du Directeur national du pôle environnement du cabinet d’avocats FIDAL. Tous ces outils acquis au fil de ces expériences m’ont permis de construire un modèle économique circulaire, éco-responsable avec un objectif de zéro déchet sur toute la chaîne de production.

J’ai aussi fait une formation Eticoop de 15 jours. Eticoop met en place un cursus de formation pour la création d’entreprise avec des modules de « chahutage » avec un économiste anglais, juridique pour le choix des statuts et la protection du chef d’entreprise, de comptabilité, d’élaboration du modèle économique et du business plan et des outils de gestion quotidienne de l’entreprise.

Avez vous rencontré des galères et comment les avez-vous gérées ?

Oui souvent, ce ne sont que des étapes qui permettent d’avancer. Il n’y a pas de problème, il y a que des solutions.

Comment avez-vous été acceptée en tant que femme dans un milieu très masculin ?

Plutôt bien maintenant voyant la ténacité.

Quels sont vos plus beaux moments depuis le début du projet ?

L’aboutissement des phases de R&D où on voit le produit s’embellir.. On a vraiment une sensation d’épanouissement.

Quelles sont les valeurs portées par Peau Marine ?

Économie circulaire, développement durable, économie locale, circuit court, cuir éco-responsable

Comment êtes-vous accueillie depuis le lancement du projet ?

Au début peu y croyait, aujourd’hui, ce projet est souvent cité en référence sur notre territoire.

Au début peu y croyait, aujourd’hui, ce projet est souvent cité en référence sur notre territoire

Comment avez-vous financé le démarrage/développement ?

En apport personnel et plusieurs dotations remportées lors de trophées.

Où en êtes-vous dans le développement ?

Toujours en amorçage, car nous sommes sur un marché de startup où il faut susciter la demande.

Votre stratégie est t-elle BtoB, ou BtoC ? Que produisez-vous ?

BtoB et peut être bientôt BtoC avec la création d’une première gamme !

Quelles sont vos stratégies marketing pour vous faire connaitre ?

Les réseaux sociaux avec notre page Facebook, les relations presses, les trophées.

La green economy, on en parle beaucoup, mais peu de nouveaux entrants créent de vrai business model, qu’en pensez-vous et que faire pour que cela change ?

Il faut modéliser ses idées dans ce sens. En voulant souvent faire mieux avec moins, faute de moyens, (nous faisons beaucoup de système D), cela force à trouver des solutions de recyclage innovantes pour y arriver.

En voulant souvent faire mieux avec moins, faute de moyens, cela force à trouver des solutions de recyclage innovantes pour y arriver

Quels sont vos prochains challenges ?

Une gamme de produits finis et une collaboration avec une grosse marque connue.

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