Un job alimentaire est aussi une formidable expérience entrepreneuriale

Un job alimentaire est aussi une formidable expérience entrepreneuriale

La vie d’un entrepreneur et a fortiori d’un néo-entrepreneur est faite d’alternance de périodes fastes et de périodes de disettes, d’activités intenses et de périodes d’introspection. Lorsque l’on décide en toute connaissance de cause de vivre dans une capitale (en l’occurrence Paris) où les prix sont de fait beaucoup plus élevés qu’en province, des choix s’imposent ! Avoir un ou plusieurs boulots complémentaires, à court ou moyen terme, en plus de son métier et de ses activités est monnaie courante et souvent nécessaire.

Qui dit boulot complémentaire ne veut pas nécessairement dire « boulot alimentaire de merde » avec un manager épouvantable et con comme la lune si vous me passez l’expression! À titre d’exemple, depuis près de 3 semaines, je bosse chaque midi dans une célèbre franchise de bagels qui a érigé l’impertinence et le côté décalé au rang de ses valeurs. Que ce soit bien clair, je ne me suis pas levée un matin en me disant : « Mon rêve, c’est de faire des bagels » ! Mais quitte à exercer un boulot complémentaire, autant bien le choisir afin d’y prendre un certain plaisir. J’ai la chance d’être tombée sur un manager sympa et respectueux qui contrairement à beaucoup de ses homologues a bien compris que des collaborateurs respectés et valorisés seront les meilleurs ambassadeurs de sa marque. Je ne vous cacherai pas qu’il n’est pas toujours évident de recevoir des directives d’une autre personne lorsque l’on est soi-même entrepreneur, mais cela permet d’avoir un regard réflexif sur ce que l’on fait et accessoirement d’apprendre 1001 astuces sur la gestion des compétences et le management des talents.

Le plus important pour moi est ailleurs. Être au service des autres me procure beaucoup de plaisir. Je me sens plus utile à bichonner mes clients et à les mettre le plus possible à l’aise à leur arrivée chez nous pour qu’ils passent un bon moment plutôt qu’à manger toute seule devant mon ordi.  Depuis mon retour en France, je constate que les relations de travail et au travail sont souvent présentées de manière extrêmement caricaturale. Les boulots alimentaires ne seraient exercés que par des gens fragiles n’ayant pas fait d’études et ne pouvant accéder au marché du travail classique. Les patrons (voyous forcément) profiteraient de cette fragilité pour exploiter leurs employés. Je ne dis pas que ces situations n’existent pas (car je sais parfaitement qu’elles existent en nombre) et que le développement d’une multitude de boulots alimentaires ne pose pas de sérieuses questions d’ordre éthique, économique, social, mais cessons de présenter les choses de manière aussi binaire ! Essayons de nuancer ce genre de propos en donnant la parole aux gens (dont je fais partie) pour qui ces boulots sont une manière de mieux vivre, de s’offrir un week-end par ci par là, une soirée au théâtre. Nous sommes les seuls à connaître nos besoins, les concessions que nous sommes prêts à faire ou ne pas faire. L’important à mes yeux est de choisir avec précaution le profil des personnes avec qui nous voulons ou allons travailler. Vous connaissez l’expression : « We do good work for good people ». Boulot alimentaire ou pas, cette règle est pour moi essentielle. Je préfèrerai toujours refuser un contrat ou un boulot même si ce n’est vraiment pas raisonnable que de devoir subir des conditions de travail éprouvantes et donc potentiellement destructrices.

Soyez acteur de votre vie. Ne vous laissez pas dicter vos choix par les autres, assumez-les en toute connaissance de cause. Ne tentez pas d’imaginer ce que les autres vont penser de vous et de ce que vous faites car c’est une sacrée perte de temps et d’énergie. N’éprouvez aucune gêne ou honte à avoir une multitude d’activités, fut-ce telles complémentaires, alimentaires, ponctuelles, durables intéressantes comme moins intéressantes. Assumez tout ce que vous faites car même si ce n’est pas ce qui vous définit entièrement, c’est ce que vous êtes. Reprenez le pouvoir !

En décidant de travailler 10h/semaine pour cette fameuse enseigne de bagels, j’ai aussi choisi de vivre la relation client de l’intérieur au quotidien. Les problématiques liées au commerce m’intéressant tout particulièrement, je ne pouvais me contenter d’être spectatrice. Je me devais d’être actrice afin de promouvoir à mon échelle, un commerce auquel je crois, celui qui est proche des gens, profondément humain, empathique, et fun. Remettre l’échange et la réciprocité au cœur des pratiques commerciales, voilà ce qui m’anime chaque jour un peu plus. Un grand merci à Frank, mon manager et à mes collègues de travail (Jenny, Linda, Arthur, Geoffrey) pour leur enthousiasme et leur bonne humeur extrêmement contagieuse qui rend cette expérience de travail beaucoup plus intéressante en vraie que sur le papier.