Audrey Bertry est une jeune entrepreneure qui ne manque ni de talents ni d’audace. En 2014, forte de son expérience au sein d’une marque de cosmétiques de niche, elle décide de créer Syllepse : sa propre gamme de cosmétiques bio. Entrepreneure dans l’âme, ce qui l’intéresse avant tout, c’est la création et les rencontres. Pour mieux comprendre son parcours et ses aspirations, nous l’avons interviewée.
Bonjour Audrey, peux-tu nous parler brièvement de ton parcours ?
J’ai fait un BTS esthétique cosmétique suivi d’une licence « Luxury & spa management ». J’ai ensuite intégré une école de commerce avec une spécialité entrepreneuriat car j’avais envie d’aller plus loin. En France, lorsque l’on entreprend des études courtes, on est rapidement catalogué. Même si la majorité des BTS sont de très bonne facture et l’accès de plus en plus sélectif, les études courtes ont moins bonne presse que les études longues considérées comme la voie royale !
Quel a été le déclic pour lancer ta marque de cosmétiques dans un marché ultra concurrentiel et dominé par de grands groupes ?
J’ai travaillé pour Absolution en 2012-2013, une marque de cosmétiques de niche où j’étais « Spa project manager ». Mon rôle consistait à implanter la marque dans des spas en France comme à l’international. Cette expérience enrichissante m’a permis d’appréhender les différents aspects de la création d’entreprise, ses succès, ses difficultés et aussi ses limites. Ça m’a vraiment passionné ! L’autonomie qui était la mienne m’a permis d’aller sur le terrain, d’être en contact direct avec la clientèle, d’avoir des retours immédiats sur la marque. C’est à ce moment-là que je me suis rendue compte que les gens parlaient toujours en termes de types de peau (peau sèche, peau grasse, peau mixte, rougeurs) et très peu en termes de teintes de peaux (peau claire, peau foncé, peau mat, peau asiatique). Sans le savoir, Syllepse était née ! L’univers des cosmétiques est un univers très cloisonné et très communautaire. J’avais envie de développer un concept qui soit à l’image de notre société : cosmopolite. J’ai donc entrepris un tour de France des laboratoires. Et là stupéfaction, j’ai découvert que l’immense majorité des laboratoires n’avaient que peu de considération pour les marchés de niche comme le mien. Seuls les grands groupes comptent. Au tout début, ma jeunesse et mon manque d’expérience ont été de sérieux freins pour ne pas dire des handicaps. On ne me prenait pas au sérieux ce qui était évidemment très frustrant. Les choses ont changé lorsque j’ai rencontré Marilyne, à la tête d’un éco-laboratoire dans les Landes qui a immédiatement cru en mon projet et qui a accepté de me suivre dans cette aventure.
L’univers des cosmétiques est un univers très cloisonné et très communautaire
Quels sont les défis que tu rencontres au quotidien ?
Entreprendre, c’est un yo-yo émotionnel, on passe par toute une palette d’émotions et il ne faut pas en avoir peur. Au quotidien, mes principaux défis sont : la recherche de clients, et la réponse aux objections. Ce qui est aussi difficile à gérer, ce sont les échéances (remboursement d’un prêt) à respecter et les factures qui tombent toujours en temps et en heure contrairement au chiffre d’affaire qui lui, fluctue. Monter une entreprise est assez simple contrairement aux idées reçues, la faire tourner et la pérenniser, c’est autre chose. Depuis quelques années, les medias business accordent une large place aux entreprises issues du numérique ou du social en oubliant certains secteurs d’activité (agriculture, artisanat) où les réussites sont peut-être moins spectaculaires, mais souvent plus durables. On est très friand des « success stories » ce qui est une bonne chose. Pour autant, « faire le buzz » n’est pas nécessairement un gage de réussite ou la promesse d’un avenir radieux. Je trouve que l’on véhicule une image un peu trop idyllique et glamour de l’entrepreneur et plus généralement de l’entrepreneuriat.
Je trouve que l’on véhicule une image un peu trop idyllique et glamour de l’entrepreneur et plus généralement de l’entrepreneuriat
As-tu déjà eu envie de tout laisser tomber. Si oui, comment t’es-tu remotivée ?
Bien sur ! La première fois, c’était quand j’ai eu des problèmes de stock. Mon manque de trésorerie m’empêchait de produire plus et de me développer comme souhaité. La deuxième fois, c’était encore lié à un problème de trésorerie, le nerf de la guerre de tout entrepreneur. Ton banquier ne voit pas toujours les choses de la même manière que toi. Là où tu aimerais de la souplesse et de la flexibilité, tu récoltes de la lourdeur et de la rigidité. L’important est d’apprendre à bien communiquer pour anticiper les frictions éventuelles et souvent inévitables.
Qu’est-ce qui te donne la banane ?
En ce moment, je suis dans une phase déterminante pour le devenir de mon entreprise. Je m’apprête à faire rentrer un associé. Au moment de la recherche, le fait de recevoir de nombreuses candidatures de personnes prêtes à participer au développement de Syllepse m’a beaucoup boosté. La fidélité de mes clients est aussi quelque chose de primordial pour moi. Enfin, le développement d’un nouveau produit et la signature récente de gros contrats me donnent bien évidemment une pêche d’enfer !
Où te vois-tu dans 5 ans ?
Sur le plan professionnel, je me vois à la tête de plusieurs entreprises. J’adore créer. Notre génération est flexible et polyvalente, nous avons une vision du travail qui n’est pas la même que nos aînés. À titre d’exemple, je ne me vois pas exercer la même activité toute ma vie. Nous sommes aussi davantage en quête de sens. Sur le plan personnel, j’ai envie de faire le tour du monde. Je m’ennuie vite et ai besoin de me fixer de nouveaux challenges. J’ai envie de partir à la rencontre d’autres cultures, d’autres manières de fonctionner, de travailler. M’installer dans un autre pays me permettrait de tester ma capacité d’adaptation, et d’apprendre à désapprendre.
Je m’ennuie vite et ai besoin de me fixer de nouveaux challenges
Qu’aimerais-tu que tes clients disent de Syllepse ?
J’aimerai évidemment que mes clients vantent la qualité et l’efficacité de mes produits. J’aimerai aussi que l’on souligne la modernité et l’authenticité du concept. Mon principal moteur est de satisfaire chaque jour un peu plus mes clients.
Quels sont tes rêves ?
Mon rêve, c’est d’avoir toujours des rêves, des objectifs à atteindre. Je veux être capable de continuer à me remettre en question et ne jamais me reposer sur mes lauriers ! Mon rêve ultime, c’est de mener un projet humanitaire pour me sentir vraiment utile et tenter de transformer une économie dominée par l’argent en une économie respectueuse des personnes et de la nature.